Yves BODIOU
Ce qui frappe, quand on regarde par exemple la série des "bols", c'est à quel point quelque chose de familier est transformé en quelque chose d'étrange, sans que l'un fasse oublier l'autre. C'est parce que l'objet est facilement reconnaissable qu'on accède à son étrangeté, et en retour c'est parce que la forme est singulière que l'ustensile de la vie de tous les jours devient intéressant, comme un petit univers intrigant qu'on pourrait tenir entre ses mains.
Un bol est un contenant simple, qu'on est amené ici à redécouvrir - une demi-sphère, à peine évasée, avec une semelle juste assez grande pour maintenir la stabilité de l'ensemble. D'où l'ambiguïté de ses limites et de son rapport à ce qui l'entoure : le bol enveloppe, enferme, concentre l'espace, et en même temps ouvre au regard, donne à voir, révèle par le haut.
La série des "bols" est donc une série de paysages à la fois contenus et bien visibles, pleins et creux, stabilisés et ouverts. Ce sont des formes, mais prises - comme on dit du béton qu'il "prend" – dans une minéralité qui nous porte au cœur de la matière. La surface plane et circulaire nous la donne à voir comme une cartographie, à distance, tout en en découvrant de proche en proche la richesse intime.
Et c'est aussi à partir des sensations familières que le bol évoque – son poids entre les mains, sa chaleur, l'épaisseur de sa paroi, le contact du bord sur les lèvres – que l'on est invité à cette exploration de la matière. Comme un ailleurs qui resterait à l'échelle du quotidien. Le spectateur hésite entre distance et proximité, et ce qui était une forme très typée culturellement (le bol de café au lait du petit-déjeuner, par exemple) devient une expérience nouvelle, sensitive et sensuelle.
Peu à peu, de sensation en sensation, ce qui ressemblait au départ au sol d'une planète inconnue redevient alors un territoire familier, mais très différent de nos références culturelles habituelles. Je retrouve, dans cette fluidité figée et définitive, une sorte d'empreinte de ce que j'aurais pu connaître indépendamment de toute habitude sociale, ou de ce que j'aurais pu faire, humainement et simplement. C'est une empreinte active, une mémoire minérale, celle du palpable et du geste qui façonne.
Né, 1954 à Quimper
Une première formation à l’école des beaux-arts d’Angers en 1978.
Diplômé des Arts Décoratifs de Strasbourg en 1985, en département sculpture.
De 1989 à 1989 lauréat et pensionnaire à la Casa Vélasquez à Madrid en Espagne.
De 1993 à1996 dispense des cours de design à l’AFIC école de stylisme chaussure à Paris.
Enfin accueil en résidence d’artiste de 1999 à 2001 à Cergy Pontoise dans le cadre de l’association Usines Ephémères.
Quelques dates récentes de l’activité artistique.
- 2014
- Galerie Akié Arichi, Paris
- Centre d'art Cotemporain Galerie Duchamp à Yvetot
- 2012
- projet EROA, une œuvre d’art en milieu scolaire, thème ; la ville.
- 2010
- résidence Les Iconoclasses XII avec la galerie Duchamp à Yvetot.
- 2008
- Oxymore, série de Paysage lumineux.
- LA PERIPHERIE à Paris.
- Villa Vinchelli – Ville en chantier – Fécamp.
- 2006
- triennales Poznan, Pologne, grand format, série déluge – élément bouée.
- projet de mise en place d’un dispositif « L’INSUPPORTABLE REVELATION D’UN MOTIF » avec Axson, fabricant de résines et de silicones.
- 2005
- Paysages et corps morcelés, Galerie Serpentine, Paris.
- GRAND FORMATS, entreprise Raja, Paris.
- 2004
- Corps objets du délit, Galerie Patrick Verret, Arras.
- 2003
- Animal et territoire, Art Sénat, Paris.
- Présentation de « SILICON SKIN » Arras.